Qu'est ce qu'une extension de construction existante ? Une extension doit-elle être limitée en surface ?

Arrêt du Conseil d’État n° 469300 du 9 novembre 2023

 

Dans cet arrêt du 9 novembre 2023 le Conseil d’État considère que lorsque le règlement d’un plan local d’urbanisme ne précise pas, comme il lui est loisible de le faire, si la notion d’extension d’une construction existante, lorsqu’il s’y réfère, comporte une limitation quant aux dimensions d’une telle extension, celle-ci doit, en principe, s’entendre d’un agrandissement de la construction existante présentant, outre un lien physique et fonctionnel avec elle, des dimensions inférieures à celle-ci.

Dans cette affaire, un recours avait été déposé devant le Tribunal administratif contre la décision autorisant l'extension d'une maison existante de 63 m², portant sa surface après travaux à 329 m². Le tribunal avait rejeté la demande des requérants, entraînant leur appel devant la Cour administrative d'appel. Cette dernière a également rejeté l'appel, soutenant qu'en l'absence de restrictions dans le plan local d'urbanisme concernant la taille des extensions autorisées dans la commune, la qualité d'extension devrait être évaluée uniquement en fonction de critères de continuité physique et fonctionnelle, indépendamment de la superficie des travaux par rapport à la construction existante.

 Saisi d’un pourvoi, le Conseil d'État a annulé l’arrêt de la Cour administrative d'appel, soulignant qu'aucune disposition du plan local d'urbanisme ne définissait la notion d'extension d'une construction existante et qu’à ce titre, la Cour administrative d'appel avait commis une erreur de droit en se limitant à un critère physique et fonctionnel pour évaluer la qualité de l'extension.

 En effet, le Conseil d’état considère que « lorsque le règlement d'un plan local d'urbanisme ne précise pas, comme il lui est loisible de le faire, si la notion d'extension d'une construction existante, lorsqu'il s'y réfère, comporte une limitation quant aux dimensions d'une telle extension, celle-ci doit, en principe, s'entendre d'un agrandissement de la construction existante présentant, outre un lien physique et fonctionnel avec elle, des dimensions inférieures à celle-ci ».

 Aussi, en l’absence de précision dans le document d’urbanisme, trois conditions pour qualifier une extension semblent requises : un lien physique entre la construction existante et les travaux envisagés, un lien fonctionnel et des dimensions inférieures à la construction existante.

 


Un droit d'affichage sur une porte cochère (partie commune d'une copropriété) peut-il faire l'objet d'une usucapion (ou prescription acquisitive) ? Cass. 3ème civ. du 22 octobre 2020 n° 19-12.588

 Il a été constaté que la pose d’enseignes en imposte sur des portes cochères n’avait pas été autorisée par l’assemblée générale d’une copropriété et que le règlement de copropriété ne contenait aucune stipulation sur ce point. En effet, une société copropriétaire avait apposé les enseignes depuis 1964, voire 1953, et avait manifesté, depuis lors, son intention de se comporter en titulaire exclusif du droit de les poser.

 Selon la Cour de cassation, un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s’acquérir par usucapion ; un tel droit peut avoir pour objet l’apposition d’enseignes sur les parties communes de la copropriété.

 Elle en a déduit (comme les juges d’appel), sans qu’il y ait lieu de caractériser une acceptation expresse des copropriétaires, qu’il ne s’agissait pas d’une simple tolérance des autres copropriétaires, mais que cette société, ayant accompli, sans interruption depuis plus de trente ans, des actes caractérisant une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque, avait acquis, par usucapion, un droit de jouissance privatif réel et perpétuel au maintien des enseignes. On peut donc prescrire ce droit...

 


Un chemin d'exploitation peut parfaitement traverser une propriété  Cass. 3ème civ. du 19/03/2020

 Les propriétaires d’une parcelle ont assigné leurs voisins en reconnaissance de l’existence d’un chemin d’exploitation sur leur parcelle voisine et, subsidiairement, d’un droit de passage pour cause d’enclave.

 Pour dire que le chemin litigieux ne constituait pas un chemin d’exploitation, l’arrêt d’appel soulignait que la propriété exclusive des défendeurs sur le chemin traversant leur propriété est inconciliable avec la qualification de chemin d’exploitation. Or, selon l’article L. 162-1 du Code rural et de la pêche maritime, les chemins et sentiers d’exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l’usage en est commun à tous les intéressés.

 Il en résulte que, selon la Cour de cassation, en statuant ainsi, alors que le droit d’usage d’un chemin d’exploitation n’est pas lié à la propriété du sol, la cour d’appel a violé le texte précité du Code civil.

Un chemin d'exploitation peut donc parfaitement traverser une propriété...

 


Loi Carrez et annexion de parties communes (ou comment ne prendre aucun risque en sollicitant un géomètre-expert...)  Cass. civ. 1 du 11 mars 2020 n° 18-26.407

Dans le cadre de la vente d'un bien intégrant une surface correspondant à des parties communes que l’acquéreur a dû acquérir ultérieurement du syndicat des copropriétaires, le notaire qui, tenu d'assurer la validité et l'efficacité de l'acte qu'il reçoit, de procéder aux vérifications préalables lui permettant, lorsqu'il authentifie une vente, de s'assurer que le vendeur est titulaire du droit de propriété sur les biens à vendre, a commis une faute en s'abstenant de vérifier que les plans en possession des parties coïncidaient avec les plans du bureau des hypothèques et que la surface des lots séparés correspondait à la surface des lots réunis. Telle est la faute du notaire, consistant dans le fait de ne pas avoir vérifié, par toutes investigations utiles, l'étendue et la teneur des droits réels dont il authentifie la vente, caractérisée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 11 mars 2020. Dans les faits, par acte reçu devant le notaire, un propriétaire a vendu, à un acquéreur, trois lots d'un ensemble immobilier dont deux d'entre eux ont été réunis à la suite de travaux effectués par les vendeurs. Se plaignant d’avoir fait l’acquisition d'un bien intégrant une surface correspondant à des parties communes qu'il avait dû acquérir ultérieurement du syndicat des copropriétaires, l'acheteur a engagé, à l’encontre du vendeur et du notaire, une action en responsabilité afin d’obtenir réparation du préjudice subi. La cour d’appel (CA Paris, 4, 1, 28 septembre 2018, n° 16/25732) n’a pas fait droit à la demande de l’acquéreur contre le notaire et à l’appel en garantie du vendeur contre celui-ci, et a, dès lors, rejeté l’engagement de la responsabilité de ce professionnel du fait de l’absence de faute commise par celui-ci. Pour écarter tout faute du notaire, les juges du fond ont retenu qu’il ne pouvait être informé qu’une partie du bien vendu appartenait à la copropriété dans la mesure où, d’une part, celui-ci n’avait pas disposé d'autres éléments sur la conformation des lieux que ceux fournis à l'acquéreur et, d’autre part, que le vendeur avait déclaré que les travaux de réunion des deux lots ne comprenaient aucune surface résultant de l'appropriation d'une partie commune, non autorisée par une assemblée générale et que le notaire n’était pas tenu de vérifier la véracité des déclarations du vendeur. En désaccord avec le motif de l’arrêt rendu par la cour d’appel, l’acheteur a formé un pourvoi en cassation et démontré, dans ses moyens au pourvoi, la faute commise par le notaire. Affirmant que le notaire est tenu professionnellement de s'assurer de l'efficacité des actes qu'il rédige et de vérifier, par toutes investigations utiles, l'étendue et la teneur des droits réels dont il authentifie la vente, le demandeur au pourvoi a allégué, comme moyen, le manquement du notaire à cette obligation de nature à engager sa responsabilité en s’étant contenté des éléments fournis par le vendeur sans procéder aux investigations qui auraient pu lui permettre de déceler que la réunion des deux lots vendus avait entraîné une appropriation de parties communes et en s’étant abstenu, d’une part, de vérifier que les plans en possession des parties coïncidaient avec les plans du bureau des hypothèques et que la surface des lots séparés correspondait à la surface des lots réunis et, d’autre part, de contrôler la véracité des déclarations du vendeur. Faisant sien l’argumentaire développé par le demandeur au pourvoi, la Cour de cassation caractérise la faute du notaire dans l’exécution de ses obligations professionnelles et casse, ainsi, l’arrêt rendu par la cour d’appel. Pour engager la responsabilité civile délictuelle du notaire et le condamner à indemniser l’acheteur, la Haute juridiction affirme, à l’instar de demandeur, que ce professionnel a manqué à son obligation, dans le cadre de la vente d’un bien immobilier, de procéder aux vérifications préalables lui permettant, lorsqu'il authentifie une vente, de s'assurer que le vendeur est titulaire du droit de propriété sur les biens à vendre en s'abstenant de vérifier, d'une part, si les plans en possession des parties coïncidaient avec les plans du bureau des hypothèques, et d'autre part, si la surface des lots séparés correspondait à la surface des lots réunis.

Pour éviter de tels contentieux, nous rappelons que les géomètres-experts doivent faire ces vérifications: ils apportent donc une garantie certaine en matière de délivrance d'attestation Carrez.

 


Obligation d'installer des compteurs individuels d'eau froide en copropriété ? Réponse ministérielle du 18 juin 2019 (JO)

Rappelons que l'article L.135-1 du Code de la construction et de l'habitation rend obligatoire l'installation de compteurs d'eau dans toute nouvelle construction d'immeuble à usage principal d'habitation. L'article R.135-1 précise que la relève des compteurs doit pouvoir se faire depuis les parties communes de l'immeuble. Le décret n° 2007-796 du 10 mai 2007 stipule que ces compteurs individuels sont obligatoires pour tout bâtiment dont le permis de construire est postérieur au 1er novembre 2007. Mais quid des copropriétés d'avant 2007 ? Une réponse ministérielle vient préciser les choses et indique que rien n'est obligatoire dans ce cas: en effet, la règlementation actuellement en vigueur pour les copropriétés prévoit un article 25 (loi du 10 juillet 1965) relatif à l'individualisation de la consommation d'eau. Si la majorité des copropriétaires prévue à cet article 25 n'est pas réunie, la loi prévoit déjà une décision simplifiée par le jeu de l'article 25-1, de façon à glisser sur une majorité plus simple du ressort de l'article 24. Mais, si cette "simple" majorité des copropriétaires présents ou représentés, pourtant incitative, n'est toujours pas obtenue, alors rien d'obligatoire n'est prévu, et la copropriété peut continuer à exister avec un compteur d'eau commun. Le ministre précise que rien n'est actuellement prévu pour rendre obligatoire la pose de compteurs individuels dans ce cas.


La vente d'un bien qui s'avère indécent au regard d'un règlement local, peut être annulée Cass. 3ème civ. du 3/05/2018

En 2010, une SCI achète un studio, alors loué. Six mois plus tard, le service d'hygiène et de santé de la mairie l'informe qu'à la suite de sa visite des lieux, il a été constaté que la pièce principale fait moins de 9m², et que le bien ne respecte pas les critères de décence fixé par le RSD (Règlement Sanitaire Départemental). La mairie demande donc de cesser, sans délai, toute occupation du logement. La SCI assigne donc les vendeurs en annulation de la vente. Les juges ont donné raison à la SCI: le bien était décent au sens du décret national 2002-120 du 30 janvier 2002, mais pas au sens du RSD. En effet, ce décret local, plus strict, prévoyait uniquement le critère de surface habitable (qui n'était pas respecté en l’occurrence), mais pas le critère du volume prévu par le décret national (qui lui était respecté).

La SCI a donc commis une erreur, rendue excusable par le fait que les lieux étaient loués au moment de l'achat.

Les vendeurs ont dû rembourser à la SCI le prix de vente, la taxe foncière, les cotisations d'assurance, et les charges de copropriété.

 

Pour éviter ce type de mésaventure, nous vous rappelons que le cabinet ARTHUR peut, à votre demande et après établissement d'un devis, vérifier les critères de décence (surface, hauteur sous plafond et volume du bien immobilier) selon les dispositions du RSD de la Gironde, avant vos transactions.

ATTENTION : ce n'est pas parce que le bien est loué depuis plusieurs années qu'il est décent... la vigilance doit être de mise.


Le bornage n'est pas un simple acte de conservation  Cass. 3ème civ. du 12/04/2018

La gestion des biens détenus en indivision obéit à des règles de majorité qui dépendent de l'importance des décisions à prendre. Un indivisaire peut agir seul pour tout acte nécessaire à la conservation du bien, alors qu"il faut le consentement des indivisaires titulaires d'au moins 2/3 des droits indivis pour les actes d'administration, et l'unanimité pour les actes de disposition.

L'action en bornage avait été qualifiée, un temps, de mesure conservatoire en cas d'urgence (cass. du 9 oct 1996): ce temps est révolu.

En effet, cet arrêt affirme que l'action en bornage n'est pas un acte de conservation, il est un acte d'administration voire de disposition selon les cas.

Ainsi, quelques indivisaires (ne représentant pas les 2/3) ne peuvent pas assigner le propriétaire voisin pour une action en bornage.

La question est donc (définitivement?) tranchée: en revanche, acte d'administration ou de disposition ... c'est toujours le flou.

Nous attendons les prochaines jurisprudences en la matière...

 


Espace boisé classé (EBC) et servitude de passage Cass. 3ème civ. du 15/03/2018

Cet arrêt confirme que le classement en espace boisé peut faire obstacle à la mise en œuvre d'une servitude de passage, même si elle est consentie avant l'adoption du régime de protection. 

Pour ceux qui en doutaient encore: le classement par un document d'urbanisme d'une zone en espace boisé est un acte qui entraine de lourdes conséquences, à ne pas méconnaitre.

Dans cette affaire la servitude de passage était initialement créée par un acte de vente, mais le propriétaire du fonds servant ne respectait pas la position prévue dans l'acte. 

La Cour d'Appel d'Aix en Provence avait dit que cette servitude devait être utilisée à l'endroit initial prévu dans l'acte.

Mais la Cour de Cassation a cassé l'arrêt en stipulant que l'EBC "interdisait tout changement d'affectation ou d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection, ou la création de boisements". La mise en œuvre de cette voie d'accès, pourtant prévue par un titre antérieur au classement de la parcelle, était donc impossible !

Rappelons toutefois que cette position stricte n'est pas nouvelle et va dans le même sens que l'arrêt de la même chambre civile de la Cour de Cassation du 15 décembre 1999.

 


Distances de vue: contigüité des propriétés indispensable Cass. 3ème civ. du 23/11/2017 (revirement de jurisprudence)

La Cour de cassation a rendu un arrêt important pour l'application des distances à respecter pour créer une ouverture sur la propriété voisine, ou pour y exercer une vue droite ou oblique. Ces distances figurent à l'article 678 du Code civil, mais la Cour rappelle qu'elles ne peuvent s'appliquer que lorsque les deux terrains concernés sont contigus.

L'affaire, située en Corse, faisait état d'une petite bande de terrain dont personne ne pouvait réellement dire à qui elle appartenait (passage commun, petit chemin d'exploitation, servitude de passage ?) mais qui existait bien entre les deux propriétés. La Cour d'appel de Bastia avait ordonné la suppression des ouvertures litigieuses, mais la Cour de cassation  a annulé la décision en estimant que les deux propriétés n'étaient pas contiguës, et que donc, l'article 678 ne pouvait s'appliquer.

On assiste donc à un revirement de jurisprudence puisque la Cour avait jusqu'à présent jugé l'exact inverse (cass. civ. 3ème du 14 janvier 2004 n° 02-18564).

 


Professionnel intervenant dans un immeuble en copropriété: devoir de conseil CA de Versailles du 24/10/2017

Un copropriétaire de 91 ans demande à un professionnel de remplacer les fenêtres de son appartement situé dans une copropriété.

Des volets en PVC sont commandés pour environ 7000 €, mais l'AG a décidé, conformément au règlement de copropriété d'ailleurs, que les huisseries ne pourront être modifiées sans le consentement de la majorité des copropriétaires. L'artisan pose les volets dont ni la teinte ni la matière ne sont conformes à ce qui est exigé par la copropriété. Le syndic assigne alors le copropriétaire qui est condamné à remplacer les volets neufs. Celui-ci assigne alors l'artisan afin d'être remboursé des 7000 € dépensés sur le manquement au devoir de conseil. Pour se défendre, l'artisan prétend qu'il aurait du être informé de la décision prise en AG. Le tribunal déboute le copropriétaire jugeant qu'il ne prouve pas un manquement de l'artisan à ses obligations contractuelles. Il fait appel. La Cour d'Appel infirme le jugement.

Il appartenait au professionnel vendeur de menuiseries acquises par un copropriétaire profane de le conseiller et de le renseigner notamment sur la conformité de son choix de menuiserie au règlement de copropriété. L'artisan ne pouvait ignorer que, dans la grande majorité des copropriétés, existent des règles destinées à préserver l'harmonie des façades des immeubles. La Cour va même jusqu'à dire que l'artisan aurait du, lui-même, se renseigner auprès de la copropriété: cette sévérité est certainement due à l'âge du copropriétaire...

Conclusion: les professionnels qui interviennent dans un immeuble en copropriété ne peuvent ignorer le règlement de copropriété et ont un devoir de conseil à ce sujet.

 


Copropriété : bruit excessif  Cass. 3ème Civ. du 5/10/2017

Un copropriétaire aménage ses combles en un logement, fort de ses autorisations administratives et conformément aux dispositions du règlement de copropriété.  Des toilettes sont notamment créées et le couple qui habite l'étage du dessous se plaint de troubles sonores découlant des aménagements réalisés. Le Juge des référés est saisi et un expert indique que des nuisances sonores ont bel et bien augmenté suite aux travaux de transformation du grenier, excédant les limites règlementaires. Un sani-broyeur est particulièrement montré du doigt.

Le TGI condamne à des dommages et intérêts le copropriétaire du dessus, qui fait appel. Le couple du dessous demande alors l'enlèvement pur et simple du sani-broyeur sur le fondement de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965. La Cour d'Appel ne leur donne que partiellement raison, en n'octroyant que des dommages et intérêts. Le couple se pourvoit alors en cassation et bien lui en prend car la cour de Cassation a considéré que le sani-broyeur devait être enlevé.

Conclusion: la jouissance de ses parties privatives, même en vertu de la destination indiquée par le règlement de copropriété, ne peut se faire que dans le respect de la tranquillité d'autrui. L'auteur du trouble doit y mettre fin même s’il n'a pas commis de faute.


Copropriété : garage au deuxième sous-sol et charges d'ascenseur  Cass. 3ème Civ. du 22/09/2016

La cour de Cassation a considéré que présentait une utilité objective pour un lot correspondant à un garage situé au deuxième sous-sol, l'ascenseur qui s'arrêtait au premier sous-sol, le copropriétaire concerné pouvant ensuite prendre l'escalier pour se rendre au deuxième sous-sol. Il convenait donc bien d'intégrer ce lot dans la grille de répartition des lots concernés par les charges d'entretien et de réparation de l'ascenseur.


L'ouverture d'un chemin au public ne suffit pas à exclure la qualification de chemin d'exploitation  Cass. 3ème Civ. du 09/02/2017

Les chemins d'exploitation servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés. L'usage de ces chemins peut être interdit au public. La cour d'Appel de Grenoble avait estimé que le chemin, étant ouvert au public (des chasseurs et des promeneurs pouvaient l'emprunter) ne pouvait pas être qualifié de chemin d'exploitation. La cour de Cassation casse et annule l'arrêt en indiquant que si le chemin n'est pas exclusivement à usage public (ce qui était le cas puisqu'il desservait aussi quelques maisons riveraines), il conserve toutes ses caractéristiques de chemin d'exploitation.


Un chemin d'exploitation ne s'éteint pas par sa disparition matérielle  Cass. 3ème Civ. du 02/03/2017

Des propriétaires de parcelles voulant réaliser des travaux assignent leurs voisins en reconnaissance d'un chemin d'exploitation desservant leurs propriétés respectives. Les juges du fond rejettent la demande au motif que le chemin, certes visible sur des photographies de l'IGN, ne figurait pas sur les plans, n'était pas mentionné dans les actes, et parce qu'il avait en grande partie disparu. Or, la cour de Cassation rappelle ici qu'un chemin d'exploitation ne peut disparaître par son non usage, et n'est pas subordonné à sa mention dans un titre. Les juges rappellent que les chemins d'exploitation ne peuvent être supprimés que du consentement de tous les propriétaires qui ont le droit de s'en servir. La disparition matérielle de ces chemins ne prive pas les riverains de leurs droits de s'en servir. Cette décision confirme celle de 1999 prononcée dans ce même sens (Cass. 3ème Civ. du 19/05/1999).


Le bornage peut-il créer une servitude ?  Cass. 3ème Civ. du 08/06/2017

Un procès-verbal de bornage peut valoir acte constitutif d'une servitude conventionnelle de passage si le plan de bornage et la convention de servitude qu'il comporte établissent la volonté claire et non équivoque des propriétaires de créer une telle servitude. Cette jurisprudence publiée au Bulletin est pour le moins étonnante ; nul doute qu'elle sera longuement débattue et analysée par nos instances ordinales. Pour l'instant, celle-ci doit être observée avec toutes les réserves nécessaires...


Notion d'enclave et passage d'un véhicule  Cass. 3ème Civ. du 16/03/2017

Dès lors que le chemin d'accès ne permet pas le passage d'un véhicule, la propriété doit être qualifiée d'enclavée même si la voie publique reste à proximité.  Pour contester la position des juges du fond, la cour de Cassation précise que "l'accès par un véhicule automobile correspond à l'usage normal d'un fonds destiné à l'habitation". La propriété doit donc être considérée comme enclavée si un véhicule ne peut pas être utilisé pour accéder à la voie publique ; et évidemment la procédure issue de l'article 682 du Code Civil peut être enclenchée.


Intervention du Géomètre-Expert dans des locaux d'une copropriété  Cass. 3ème Civ. du 05/10/2017

Une assemblée générale de copropriétaires adopte une résolution missionnant un géomètre-expert pour procéder au mesurage des lots. Le propriétaire d’un de ces lots et son locataire en refusent l’accès. Le syndicat des copropriétaires les assigne en autorisation d’accéder à leurs locaux.

La cour d’appel accueille cette demande. Elle rejette l’argumentation des défendeurs qui soutenaient que la décision de l’assemblée générale, qui impliquait de pénétrer au domicile du locataire, portait une atteinte disproportionnée au droit au respect du domicile protégé par la Convention européenne. La cour d’appel considère que cette ingérence n’est pas disproportionnée au regard du but légitime poursuivi, visant à s’assurer que la répartition des charges est en adéquation avec les surfaces respectives des différents lots.

La Cour de cassation confirme.

Le refus d’un copropriétaire de laisser accéder le géomètre-expert à son lot constitue donc un trouble manifestement illicite vis-à-vis de la copropriété.


De l'importance d'une décision en AG... même contraire au RCP

Cass. 3ème Civ. du 08/06/2017

En principe, un copropriétaire peut changer l'usage de son lot, dès lors qu'il respecte l'affectation définie par le règlement de copropriété, et sans avoir besoin de solliciter l'accord de l'AG.

En revanche, si, mal informé, il demande cet accord et essuie un refus, il doit s'y soumettre, dans la mesure où la décision est devenue définitive (donc après le délai des deux mois prévus pour contester la décision).

C'est ce qui est arrivé à un copropriétaire qui souhaitait affecter ses locaux commerciaux à une autre activité, comme le lui permettait le RCP.

Mais il a sollicité l'autorisation de l'AG, qui la lui refuse. Il n'en a pas tenu compte, sûr de son bon droit. Mal lui en a pris puisque le syndicat fort de son refus de l'AG, l'assigne en cessation de son activité.

La Cour d'Appel donne raison au syndicat et la Cour de Cassation également. A retenir : une décision d'AG doit s'appliquer dès lors qu'elle est devenue définitive, même si elle s'oppose au changement d'affectation d'un lot conforme au RCP ; et même si son autorisation, au départ, n'était pas nécessaire.


Prescription acquisitive par le syndicat Cass. 3ème Civ. du 26/01/2017

L'article 2272 du Code Civil dispose que le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de 30 ans. Un lot, à usage de garage, avait été utilisé, pendant plus de 30 ans, par l'ensemble des copropriétaires.

Ce lot est vendu. Le syndicat des copropriétaires assigne les vendeurs en inopposabilité de la vente et restitution du lot.

La Cour d'Appel rejette la demande, et retient en outre que l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 interdit d'imposer à un copropriétaire la transformation d'une partie privative en partie commune, fût-ce par le jeu de la prescription acquisitive, et que l'objet du syndicat des copropriétaires étant de conserver et d'administrer l'immeuble, celui-ci ne peut porter atteinte aux droits fondamentaux des copropriétaires et donc ne peut acquérir, par prescription, les parties privatives du lot de l'un de ces membres.

La Cour de Cassation casse l'arrêt et considère qu'aucune disposition ne s'oppose à ce qu'un syndicat acquière, par prescription, la propriété d'un lot.

La Cour d'Appel a violé l'article 2272 du Code Civil.


Transformation d'une dépendance privative  Cass. 3ème Civ. du 26/05/2016

L'acquéreur d'un appartement avec terrasse privative transforme une dépendance privative, située sur cette terrasse, en habitation. Des copropriétaires invoquent le fait qu'aucune autorisation de l'AG n'avait été sollicitée et demandent la remise des lieux en son état antérieur.

La Cour d'Appel, pour rejeter cette demande, retenait que le volume initial de la dépendance n'avait pas été modifié, et que l'affectation de celle-ci en habitation était conforme au RCP et qu'elle ne saurait dès lors être qualifiée d'illicite.

La Cour de Cassation casse l'arrêt, en considérant que ces travaux emportaient changement de la destination de la dépendance telle que déterminée par le RCP, de sorte qu'ils auraient dû être autorisés par l'AG.

Cette position est conforme aux préconisations du Cabinet ARTHUR en la matière. Nous rappelons que nous établissons tous les modificatifs de copropriété notamment en cas de changement de destination d'une partie de lot.